PREVIEW - Back 4 Blood, digne héritier de Left 4 Dead ?
- Par FrenchKat - Vossey.com, publié
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On l'attendait de la part de Valve, mais le titre qui s'apparente le plus au Left 4 Dead 3 que nous n'attendions plus est donc venu de Turtle Rock Studios. Pas de quoi s'inquiéter, puisque la firme fondée en 2002 par Michael Booth et rattachée à Valve entre 2008 et 2010 sous le doux nom de Valve South est à l'origine du premier opus de la série. C'est donc sur un terrain connu que le studio à la tortue de pierre, refondé en 2010 après un petit micmac organisationnel avec Valve, a lancé le développement de Back 4 Blood. Si on ne connait pas la date exacte du début du projet, celui-ci a été annoncé en mars 2019 et avait fait naître bien des espoirs pour les fans du genre. Reste à voir si ces espérances étaient fondées ou bien si nous sommes bons pour retourner errer dans des coins sombres à pleurer, telle une Witch en déperdition dans l'attente éternelle de son élue Left 4 Dead 3 qui ne reviendra hélas jamais.
Nous parlions de terrain connu pour les développeurs, mais ce Back 4 Blood l'est également pour les joueurs. Comme son aïeul, Back 4 Blood nous propose de dégommer du zombie en masse avec pour but de traverser une série d'environnements accompagné de trois autres joueurs. S'agissant d'une version alpha, nous n'avons accès qu'à une seule campagne découpée en quatre maps. Les joueurs, jamais satisfaits que nous sommes, auraient aimés plus. Mais cela suffit largement pour s'occuper durant la durée de l'alpha, accessible du 17 au 21 décembre 2020 à condition d'avoir eu une clé d'accès. De façon classique, le jeu permet de s'équiper d'une arme principale (fusil à pompe, fusil d'assaut ou fusil de précision) accompagnée d'une arme secondaire (pistolet ou arme de corps à corps) et d'équipements supplémentaires comme l'indispensable cocktail molotov, grenade à fragmentation, kit de soin, bandage, etc. Rien de bien nouveau sous le soleil, jusqu'ici.
Rassurez-vous, Turtle Rock Studios ne s'est pas contenté de simplement réaliser une copie de Left 4 Dead, mais a également ajouté plusieurs nouveaux éléments qui viennent rafraîchir le genre. Les équipements dont nous venons de parler ne se trouvent pas uniquement posés sur le sol, comme c'était précédemment le cas, mais peuvent aussi s'acquérir via une boutique accessible à chaque zone sécurisée intermédiaire, en début de niveau. Qui dit boutique, dit moula à dépenser et celle-ci est matérialisée par des piles de pièces de monnaie que vous devrez amasser au cours de vos parties. Chaque joueur commence avec 250 (l'équivalent d'une grenade et d'un bandage) et chaque butin récolté par un membre de l'équipe viendra alimenter le portefeuille de l'ensemble des joueurs, de quoi éviter les petites espiègleries entre joueurs se disputant la propriété d'une trouvaille sonnante et trébuchante.
Des nouveautés, on en trouve aussi du côté des zombies spéciaux qui se veulent plus variés que dans Left 4 Dead 2. Si évidement plusieurs s'en inspirent de très près, Turtle Rock propose ici de nouvelles terreurs qui viendront pourrir vos escapades. Dans les notables, on retiendra l'énorme monstre de 6 mètres, tout droit venu de l'enfer dont les trailers du jeu ont plus que capitalisé. Aussi, la petite peste qui nous immobilise à l'aide d'une toile d'araignée, nous rendant ainsi terriblement vulnérable aux attaques. Un autre infecté spécial disposant d'un bras bien plus gros que l'autre (que l'on surnomme affectueusement le « Nadal »), cherchera à vous saisir afin de vous briser au sol. Les zombies standards se comportent de façon similaire à Left 4 Dead et viendront vous faire la bise, une fois que vous vous trouverez dans leur champ de vision (sans pour autant respecter la distanciation sociale).
Si vous trouvez le jeu toujours trop classique, il est temps de parler de l’éléphant dans la pièce : le système de deck et de cartes « roguelike » viendront pimenter votre partie et la rendre en quelque sorte « unique »... c'est en tout cas ce que promettent les développeurs. À chaque nouvelle partie, le jeu va aléatoirement tirer 5 cartes « Corruption » pour déterminer les infectés spéciaux qui apparaîtront, ainsi que des malus (comme de la brume) auxquels vous devrez faire face. Côté joueur, vous devrez préparer plusieurs decks de cartes au sein desquels vous pourrez établir une stratégie de jeu (un « build » comme diraient les anglophones), en favorisant par exemple les bonus de combat au corps à corps, avec la possibilité de regagner de la vie en découpant des zombies à la machette, ou des bonus d'armes à distance, avec par exemple la possibilité de recharger 10% plus rapidement. Le deck déterminera également avec quelles armes vous débuterez la partie. Au total, votre deck doit être composé de quinze cartes pour être validé par le jeu et cinq d'entres-elles seront sélectionnées avant le lancement. Vous tirerez de nouvelles cartes au fur et à mesure de votre progression, ce qui vous rendra, vous et votre équipe, de plus en plus puissant.
Une fois dans la partie, la première chose qui saute aux yeux, c'est la qualité graphique impressionnante pour un jeu multi-joueur. La maitrise de l'Unreal Engine 4 par Turtle Rock a de quoi faire des jaloux. Le jeu n'est pas avare en effets graphiques réussis. Textures de qualité, effets d'explosion décoiffants, armes très détaillées, particules et gerbes de sang qui en mettent plein les yeux : la liste des réussites graphiques est longue, et nous sommes forcé de constater que le studio a pris le temps de travailler le sujet. Voir ses coéquipiers progressivement se recouvrir de sang, à force de déchiqueter inlassablement des zombies au corps à corps qui viendront s'empiler à vos pieds, sur plusieurs couches. Cela procure une grande satisfaction et plonge d'avantage le joueur dans l'immersion du titre. À part quelques petits loupés visuels qui restent assez ponctuels (les corbeaux par exemple...), et des problèmes d'optimisations inhérents à toutes versions alpha, le jeu est techniquement déjà prêt pour le 22 juin 2021, sans même parler de l'ambiance générale et sonore qui représentent un grand pas en avant par rapport à Left 4 Dead malgré l'absence de musique.
Si la technique et les graphismes suffisaient pour faire un bon jeu, Back 4 Blood serait très bien parti pour faire l'unanimité... Mais le problème c'est le gameplay et le titre de Turtle Rock a malheureusement moins d'arguments en sa faveur de ce côté-là. Ne vous méprenez pas, le gameplay pur de Back 4 Blood est plutôt bon : il n'aura jamais été aussi satisfaisant de mettre un headshot à un zombie ou de tirer une rafale d'AK47 sur une vague d'infectés qui se jettent sur vous. Les sensations des armes sont plutôt bonnes même si elles manquent globalement de punch, et les armes au corps à corps ne sont pas très intéressantes à utiliser. Les zombies représentent également une véritable menace, tant par leur nombre que par l'agressivité des infectés « spéciaux », qui vous donneront du fil à retordre malgré la présence sur leur corps d'un point faible de couleur rouge.
Le véritable problème de cette alpha est l'équilibrage général nuancé en trois modes de difficulté : Classic, Survivor et Nightmare. Le mode classique est très similaire au mode normal de Left 4 Dead 2, c'est à dire assez facile à condition de rester groupé. Les zombies ne font pas trop mal et sont faciles à éliminer, il est possible de relever ses amis tombés au sol et tout le monde regagne sa vie une fois la map terminée. Bien qu'abordable, le mode Classic manque d'intéret et vous viendrez à bout des campagnes assez rapidement. Le mode Survivor marque en revanche un écart important et s'apparente au mode Expert de Left 4 Dead, en terme de challenge. Ici, toute mort est directe puisqu'il n'est plus possible de relever ses coéquipiers malchanceux et les zombies sont bien plus dangereux et résistants.
La problématique n'est pas tant la difficulté brute, mais plutôt les moyens que le jeu nous offre pour y faire face. Devant la surpuissance des zombies qui nécessitent de nombreuses balles avant d'être envoyés au tapis, les munitions disponibles pour les 4 survivants sont très limités. Bien sûr, il est normal de devoir être économe dans un mode de difficulté élevé, mais on se retrouvera malgré tout souvent à court de munitions avant même d'avoir traversé la moitié de la map. Les infectés spéciaux, bien que très réussis visuellement, représentent le catalyseur de cette mauvaise gestion de la difficulté. En plus de nécessiter, pour certains, un nombre incroyable de balles pour être tués, la menace qu'ils incarnent n'est pas en adéquation avec la capacité de notre personnage à y faire face. Les survivants ne sont pas très agiles alors qu'il est souvent nécessaire d'esquiver des projectiles, provenant notamment des infectés araignées, qui vont à une vitesse bien trop élevée pour pouvoir être évité. Le paroxysme de cela est sans doute l'infecté « Nadal », qui en plus d'être un sac à PV, va vous foncer dessus à la vitesse de la lumière tout en infligeant énormément de dégâts sur une zone bien trop large. Lors de nos tests, il nous est arrivé de tomber sur trois Nadal d'un coup juste après avoir ouvert la porte de l'abri... Inutile de dire que nous n'avons pas tenu une minute lorsqu'ils se sont rués à l'intérieur même de cet abri en nous assenant de revers du droit, dont seul le grand Nadal a le secret. Du côté des armes, l'AK47 est l'arme de base la plus viable que la plupart des joueurs conserveront. Le fusil à pompe reste convenable, mais la limite de 3 balles chargées est bien trop faible pour le rendre vraiment efficace quand la difficulté est élevée. Enfin, le fusil de sniper est pour le moment complètement inutile : sa cadence de tir est bien trop faible pour affronter une vague de zombies, et l'absence de lunette de visée de base le rend également caduc pour éliminer les cibles à longue distance.
Heureusement, il s'agit d'une alpha et le but des développeurs est bien entendu d'obtenir le retour des joueurs afin d'effectuer des ajustements d'équilibrages. L'autre principal sujet d'inquiétude qui n'a cette fois-ci rien à voir avec le gameplay est le modèle économique que nous réserve Back 4 Blood. La récente association à Warner Bros Games qui produit le titre n'augure rien de bon à ce niveau-là. La politique tarifaire du jeu qui est déjà pré-commandable à 60, 90 et 100 euros indique qu'une myriade de DLC (dont certains ajoutant de nouvelles campagnes) est prévue pour le titre et que les micro-transactions seront légions. Le système de carte qui montre pour l'instant beaucoup de potentiel peut facilement être gâché si les joueurs les plus fortunés peuvent acheter les meilleures cartes du jeu. On peut également parier que l'existence de DLCs-Campagne indiquent que la communauté ne disposera pas d'outils permettant de concevoir ses propres maps, ce type d'outil n'étant pas dans les habitudes de la maison Warner Bros... Regrettable, quand on sait que Left 4 Dead 2 doit une partie de sa longévité à sa communauté et son nombre de campagnes customs originales.
Pour l'instant, il nous est difficile de justifier une dépense de 60 euros pour Back 4 Blood. Le jeu est beau et dispose d'un feeling plutôt bon, mais n'innove pas suffisamment pour demander un tel prix, surtout quand Left 4 Dead 2 fait toujours mieux sur certains aspects, encore aujourd'hui. Le système de deck de cartes est une bonne idée, mais pour l'instant assez limité : les parties se ressemblent toutes car les joueurs se ruent sur les mêmes bonus, ceux se montrant les plus visibles et efficaces. Les cartes « Corruption » ne changent pour l'heure pas grand chose malgré les promesses de « FPS Roguelike » et ce n'est pas l'ajout d'une brume peu épaisse qui suffira à nous convaincre du contraire. Il va falloir être plus original et trouver des éléments plus impactant pour le joueur si Turtle Rock veut marquer les esprits sur ce point.
Finalement, le plus gros problème de Back 4 Blood, c'est l'existence même de Left 4 Dead 2, auquel on va tantôt lui reprocher d'être un peu trop proche de la copie, tantôt regretter qu'il ne fasse pas aussi bien. Les différents retours montrent que ceux découvrant le titre sans avoir joué à Left 4 Dead 2 semblent fortement l'apprécier, alors que les joueurs aguerris du jeu de Valve ont tendance à se montrer sceptiques, comme l'est votre fidèle serviteur.
Turtle Rock Studios dispose donc de 6 mois (hors report(s) éventuel(s)) pour peaufiner sa création et lui donner une véritable identité : il serait dommage de reproduire une nouvelle fois un naufrage tel que l'a été Evolve il y a quelques années. On espère que le développeur n'a pas joué toutes ses cartes et qu'il lui reste encore plusieurs atouts à dévoiler pour faire de son Back 4 Blood un véritable héritier à Left 4 Dead 2, qui semble avoir une couronne manifestement toujours bien en place, et ce depuis 11 ans déjà !
Merci à Gh0st pour sa relecture !